Adieu veau, vache, « Porren-cochon »…
Rien ne sert de courir, il faut partir à point.
Quinze membres courageux en furent les témoins.
L’aventure de trois jours ne fut pas une fable.
Par monts et par « veaux » puis d’étables en étables,
Tel le petit Jésus de la crèche, s’endormirent
Ainsi à même la paille à la ferme du bonheur.
Mais point d’âne et de bœuf pour fournir la chaleur,
De sorte qu’en pleine nuit, le froid vint engourdir
Les corps bien trop légèrement emmaillotés
De ceux qui regrettèrent le choix d’un fin duvet.
Au matin, cette nuit fut bien vite compensée
Par la dégustation d’un divin déjeuner.
Tous bien ragaillardis par ce plein d’énergie,
En trois coups de pédale, rendus à Porrentruy.
Vite, pas de temps à perdre, pour aller jusqu’à Bienne,
Profitèrent du train ; quinze vélos, faut qu’ça tienne.
Le cheminement du train au funiculaire
Direct ensuite les emmène dans les airs.
Bicyclettes et passagers bien empilés,
Apprécièrent de s’épargner tant de dénivelé,
Avec une vue sur le lac bien dégagée.
Sitôt arrivés, leurs selles déjà enfourchées,
Tout le groupe se lança dans la longue « Ascension »,
Paradoxalement en plein week-end de Pentecôte,
Du col du Mont Chasseral, une bien belle côte !
Point d’Alpes à l’horizon, petite déception.
Au bout de la pente, quand la bise fut venue,
La métairie ne les laissa pas dépourvus.
Jambon à l’os, röstis, tome et une bonne fondue,
Composèrent le menu de nos plus goulus.
Une bonne nuit là-dessus, il n’y paraîtra plus.
Au lever, ce sacré grand « becquet » de Thierry,
Dixit la patronne de cette métairie,
S’était mis en tête d’arpenter la prairie,
En quête de la vue des Alpes non loin d’ici.
C’est finalement au cours du petit déjeuner,
Qu’il trouva une vue non moins intéressante,
Logée entre la table et la vieille cheminée,
Au creux du décolleté d’une demoiselle charmante.
Après satisfaction d’un naturel besoin,
Dans un décor rustique au très fond du jardin,
La visite aux marmottes tôt dans la matinée,
Sonna le début d’une animalière journée.
C’est ce matin-là qu’une vice-trésorière
Déclara d’un coup les symptômes d’un mal mystère.
Est-ce les röstis, le grand air, ou l’altitude
Qui lui firent adopter une drôle d’attitude ?
En comptant les billets, elle jurait à tue-tête,
Pleine de tocs, s’agitait au milieu de la nuit,
S’imaginant combattre une guêpe ennemie,
Tel le lion au moucheron : « Va-t’en, chétif insecte ! »
Les autres la surnommèrent Brigitte De La Tourette.
Même le taureau campé au bord du chemin,
Face à cette femme féroce, ne fit pas le malin.
Du coq à l’âne en passant par chevaux et bovins,
Tous laissaient passer les cyclistes sur leur terrain.
Ce faisant, l’attention de Jean-Paul fut captée,
Par la croupe d’une belle Blonde d’Aquitaine esseulée.
Tant et si bien qu’à force il se fit distancer,
Du reste de la bande en pause au premier café.
L’ensemble des troupes finalement rassemblées,
Purent se remettre en route pour la fin du tracé,
Rejoignirent en fond de vallée les rives du Doubs,
Après un parcours qui ne l’était pas du tout.
Arrivée au camping, première douche du séjour,
Mais il fallut un moment, attendre son tour.
D’un côté tous les grands filèrent au restaurant,
De l’autre les gamins « passèrent leur bac », braves enfants…
Etape finale vers l’arrivée, en avant toute !
Moins de côtes, mais tout de même une dernière pour la route.
Arrêt au bourg de St Ursanne, patron des ponts,
(Grâce à qui nous profitons de week-ends plus longs),
Pour acheter le pain de l’ultime gueuleton,
Savouré dans un champ sur le dernier tronçon.
Plus que quelques kilomètres à avaler,
Avant la glace promise, une fois arrivé.
A l’unisson clamèrent, Porrentruy nous voici !
Ici même le périple de trois jours finit.
La proximité constante avec dame nature,
A créé le piment de toute l’aventure.
Moralité :
Rien de tel qu’une escapade cycliste en Suisse,
Pour avant l’été, bien galber fessiers et cuisses.
Ils n’ont pas leur pareil ces accueillants Helvètes,
Pour, de votre bourse, amincir la silhouette.
Mélanie de La Fontaine
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