Une fois n’est pas coutume, Patrick F. nous livre un article sérieux, au premier degré, sans jeu de mots ou presque mais c’est normal car on ne rigole pas avec les avalanches. Il devrait d’ailleurs être lu et médité par tous nos skieurs !
Participant régulièrement à la journée « initiation au ski de randonnée » organisée pendant les stages de Février par Oxygène, j’ai profité de cette actualisation pour en connaître un peu plus sur la neige, les avalanches et l’utilisation de l’ARVA 1 déjà utilisé au cours d’exercices.
Le stage a eu lieu au refuge du Boedelen, sur la route de Sewen en partant du Ballon d’alsace. En face des pistes de ski du Grand Langenberg.
Après avoir garé les voitures et après 20 minutes de marche dans une neige bien lourde, nous sommes arrivés dans ce magnifique refuge qui domine la vallée de Massevaux. Ancienne ferme, ce refuge à été loué au ski club de Massevaux en 1948 pour une durée de 99 ans, on peut donc s’y installer sans crainte d’être viré dans la nuit !!
L’accueil fut plus que chaleureux, étaient présents les membres du club de Massevaux, de Cernay et un petit groupe d’oxygéniens dont certains étaient arrivés là par un itinéraire dérobé.
Cette réactualisation du maniement de l’ARVA a lieu tous les ans et les deux clubs alsaciens se reçoivent alternativement.
C’est donc François (Franzy) et Jean Luc qui nous ont fait le topo théorique et pratique, ils ont eux même été victimes d’avalanches et nous ont fait partager leur expérience.
Le samedi soir nous avons commencé par la nivologie qui consiste à étudier la neige et ses différentes métamorphoses.
Rappel des différents types de neige et de flocons, les transformations de la neige suivant la température, le soleil, la nuit, le vent et la pluie.
Nous distinguons en neige fraîche :
– Les cristaux de neige fraîche
– La neige roulée et le grésil.
– Le cas particulier du givre de surface qui pousse sur le manteau neigeux.
Ensuite la transformation due à la température, le vent, le soleil, et la pluie, donne plusieurs sortes de neiges transformées :
– Les particules reconnaissables
– Les grains fins avec lesquels il est si facile de découper des blocs de neige
– Les grains à faces planes qui coulent du sucre en poudre dans la main
– Les gobelets qui n’ont égalmeent aucun cohésion entre eux
– et pour finir les grains ronds caractéristiques de la neige mouillée
Pour de plus ample renseignement, voir le site de l’ANENA, .
Globalement les formateurs ont mis l’accent sur trois éléments :
1. Le sol est toujours à 0°C et le manteau neigeux a tendance à se transformer à sa base si la température extérieure est négative.
Création de cristaux de type gobelet puis grains ronds, qui permettent le glissement du manteau vers l’aval si la pente est importante. Pente supérieure à 30°
2. Le manteau neigeux est composé de couches correspondant aux différentes chutes de neiges.
Ces couches successives ont une histoire différente et ont subit des transformations liées aux gradients de température, au soleil, au vent et à la pluie, suivant l’exposition géographique du versant sur lequel le manteau neigeux se trouve.
3. La cohésion du manteau neigeux dépend de la cohésion entre les différentes couches, qui le rende plus ou moins stable. Plus la neige est transformée plus la cohésion du manteau est bonne.
La cohésion du manteau neigeux avec le sol varie suivant son épaisseur et surtout la transformation de la couche en contact avec le sol.
La neige fraiche est peu cohérente. Plus une couche est dure, moins la couche sus-jacente, c’est à dire au dessus, sera adhérente .
« Ce n’est pas parce qu’il a fait froid pendant trois jours que le manteau neigeux est stable »
En pratique :
Il nous faut étudier la globalité du manteau neigeux quand il est supérieur à 30 cm d’épaisseur.
Pour cela nous étudions une coupe verticale façonnée à la pelle.
Avec les doigts nous pouvons tester les différentes textures des couches correspondant aux chutes de neiges plus ou moins anciennes, ainsi nous pouvons repérer s’il existe des couches dures (surfaces gelées, givre) qui ne rendent pas le manteau cohérent.
Ensuite nous pouvons réaliser une excavation en forme de part de gâteau en descendant avec le tranchant de la pelle jusqu’à la limite inférieure de la première couche.
En réalisant ce geste doucement nous testons l’adhérence de la couche supérieure avec la couche sous jacente, si cela vient sans résistance, il y a un fort risque de glissement d’une couche par rapport à l’autre. Nous continuons ainsi couche après couche, jusqu’au sol.
Il nous faut aussi étudier la pente. Si elle est inférieure à 30° le risque de rupture de cohésion est normalement faible mais il faut toujours se méfier de ce qui pourrait provenir de plus haut !.
Jean Luc nous a expliqué dimanche matin une possibilité d’évaluer la pente sur le terrain avec les bâtons de ski (et une théorie sur le triangle isocèle), mais je n’ai rien compris ! Il nous faudra demander à nos moniteurs Oxygène le pourquoi du comment de la méthode !
NB: Un baton horizontal, un baton vertical. Si le baton horizontal croise le vertical plus haut que la moitié, cela signifie que la pente est supérieure à 30°. S’il est tout en haut, la pente fait 45°, remettez vite vos bâtons car vous allez tomber !
Bref, avant de partir, nos chers cadres, de part leur expérience et leur discernement, analysent l’état du manteau neigeux 2
Nous avons abordé ensuite LES RISQUES D’AVALANCHE :
Une avalanche est une masse de neige qui dévale une pente à plus ou moins grande vitesse.
Il existe trois sortes remarquables d’avalanche :
– L’avalanche de neige récente (c’est ce dont nous entendons parler aux informations en ce moment);
– l’avalanche de plaque dure (due à une sous couche fragile);
– l’avalanche de neige humide (ou de fonte) plutôt observée au printemps.
Cela peut être aussi un mixte des trois suivant l’état du manteau neigeux, les précipitations, la température etc.….
Le départ de l’avalanche peu être spontané ou déclenché.
Les causes peuvent être liées à l’évolution interne du manteau neigeux (diminution des résistances) suivant les différentes transformations.
Les causes peuvent être externes au manteau neigeux (augmentation des contraintes) :
– par des contraintes naturelles comme une chute de neige, une accumulation due au vent, une chute de pluie, une chute d’un sérac ou d’une corniche, ou tout simplement le passage d’un animal.
– Par des contraintes liées à l’intervention humaine : Volontaire : déclenchement à l’aide d’explosif ou de ski. Involontaire : passage d’un skieur, surfeur, raquettiste….
Ce risque d’avalanche augmente avec la pente et varie suivant la stabilité du manteau neigeux (météorologie).
Pour connaître le risque d’avalanche dans une vallée que l’on ne connaît pas il est préférable de contacter quelqu’un qui connaît bien la vallée et surtout qui connaît l’histoire du manteau neigeux : les différentes précipitations, ensoleillement, gelée, dégel, depuis le début de la saison. (guides, club de ski)
Si les précipitations de début de saison sont abondantes, la première couche est épaisse. C’est plutôt favorable pour la cohésion future du manteau et de son adhérence au sol pour le reste de la saison, l’inverse invite à la prudence.
Donc le meneur de la randonnée contacte systématiquement le B.R.A. le Bulletin d’estimation du Risque d’Avalanche au 08.92.68.10.20.
Le BRA donne une évaluation du risque suivant l’échelle européenne du risque d’avalanche.
Le risque est donné en niveau (le niveau 0 n’existe pas) :
– Niveau 1 = Manteau neigeux stabilisé dans la plupart des pentes
– Niveau 2 = Dans quelques pentes suffisamment raides, le manteau neigeux n’est que modérément stabilisé. Ailleurs il est bien stabilisé.
– Niveau 3 = Dans de nombreuses pentes suffisamment raides, le manteau neigeux n’est que modérément à faiblement stabilisé.
– Niveau 4 = Le Manteau neigeux est faiblement stabilisé dans la plupart des pentes suffisamment raides.
– Niveau 5 = L’instabilité du manteau neigeux est généralisée.
En général le risque de niveau 1 et celui de niveau 2 ne posent pas de problème pour l’évaluation de la situation et la prise de décision pour la course que l’on veut réaliser. Le risque de niveau 5 non plus, car il interdit toute sortie.
Pour les risques de niveau 3 et 4, l’expérience et la formation des cadres leur permet d’évaluer localement le risque et de prendre la décision la plus adaptée. Suivant le parcours choisi et leur connaissance du terrain : maintient de la sortie, remise de la sortie à un autre jour, changement de parcours, attente d’une évolution de la météo, annulation de la sortie ….etc…
LA GESTION INDIVIDUELLE DU RISQUE :
Si nous sommes témoins d’une avalanche, la rapidité est de rigueur.
Nous avons 15 minutes pendant lesquelles la chance de sauver une victime est optimale si elle n’a pas subit de traumatisme important pendant l’avalanche
.
Pour être rapide il faut être équipé d’un A.R.V..A., d’une pelle légère mais solide, et d’une sonde.
En outre, il nous faut connaître le nombre exact de participants pour pouvoir le communiquer en cas de besoin (transmission téléphonique par exemple) même si nous ne sommes pas responsables du groupe.
Connaître le numéro de téléphone pour prévenir les secours : N° des secours en montagne du massif ou à défaut le 112. Le demander avant le départ à notre guide ou moniteur.
Si l’avalanche emporte plusieurs randonneurs qui sont devant nous : repérer une des victimes et ne pas la quitter du regard, pour être au plus près de l’endroit de sa disparition quand la coulée s’arrêtera.
L’ARVA, appareil de recherche de victime d’avalanche.
Indispensable en mode émetteur pour être repéré sous la neige, il l’est aussi en mode recherche pour sauver un randonneur. A faire réviser régulièrement, (périodicité donnée par le constructeur). Il est indispensable pour toute sortie en randonnée ou hors piste et fait partie du triptyque qui conditionne la rapidité de découverte de la victime, c’est-à-dire ARVA/pelle/sonde.
Etre sûr du bon fonctionnement des piles. Pas de piles au lithium, ni de batteries rechargeables (peu fiables). Les piles alcalines sont recommandées.
Il en existe trois sortes : analogique, numérique ou mixte.
Nous avons testé les deux premiers sur le terrain au BOEDELEN.
Le numérique est le plus rapide pour nous rapprocher de la victime pour les 15 premiers mètres, mais il est très sensible et la recherche finale est plus délicate. Il permet néanmoins de gérer les priorités et différencie la distance qui nous sépare des victimes s’il y en a plusieurs.
L’analogique suit les ondes courbes de l’émetteur et l’approche au début est plus lente, mais la recherche finale semble plus rapide. Plus complexe si il y a plusieurs victimes.
La pelle : Elle doit être dans le sac. Sur le sac elle risque de se faire arracher.
La sonde : Elle doit être aussi dans le sac. Elle est pliable. Les couleurs rouge et jaune alternent tous les 40 cm. L’entrainement à son maniement permet de distinguer un corps (ou une partie) d’un objet de la nature (bois, pierre, etc…).
Le sifflet : Facilement accessible il permet d’appeler quand la visibilité est défavorable. Tout skieur devrait avoir un sifflet facilement accessible.
Dans tous les cas la réussite d’une recherche dépend de l’entrainement que l’on a à utiliser l’ARVA , la pelle et la sonde :
La technique de recherche primaire consiste à descendre (ou remonter suivant le cas) à pied ou à ski, l’ARVA en position « recherche », en quadrillant la totalité de la coulée d’avalanche.
La trace de notre parcours est perpendiculaire à la direction de l’avalanche et nous effectuons un virage à 15 mètres du bord de la coulée, puis nous continuons perpendiculairement mais dans l’autre sens et à 30 mètres plus bas (ou plus haut).
La distance séparant notre trace aval, de notre trace amont n’excédant pas plus de 30 mètres pour que notre ARVA puisse couvrir 15 mètres amont et 15 mètres aval.
Ainsi nous couvrons tout le terrain (voir le dessin au dos de l’arva).
Ensuite une recherche secondaire, pour se rapprocher à 2-3 mètres.
Puis la localisation fine en croix jusqu’à 50 cm prés de l’aplomb de la victime au ras de la neige.
Puis le sondage. On laissera toujours en place une sonde qui semble avoir touché le corps d’une personne ensevelie, d’où la nécessité d’avoir plusieurs sondes dans un groupe.
Et enfin le pelletage à l’aval du sondage positif, pour permettre le façonnage d’un plan horizontal d’évacuation de la victime et une extraction plus facile et rapide. Cette opération peut être longue, elle doit être effectuée par plusieurs personnes afin de nécessiter le moins de temps possible.
LA GESTION COLLECTIVE DU RISQUE :
Avant de partir : Signaler l’itinéraire et l’heure de retour estimée.
Sur le terrain : Ne pas sortir seul, le nombre de trois semble correspondre à la sécurité. Il faut que tous les participants soient concernés par le risque.
Tout d’abord en respectant des distances de sécurité données par le moniteur ou guide dans les passages à risques. 100 mètres voire 150 mètres entre chaque randonneur. Cela permet d’une part de ne pas surcharger le manteau et d’autre part de limiter le risque d’ensevelissement de plusieurs personnes par une coulée.
En effet la chance de survie des victimes diminue avec l’augmentation du nombre de victimes. Autrement dit, il vaut mieux être cinq à chercher une victime que, un seul à chercher cinq victimes. C’est comme quand on perd un ski !
C’est surtout se sentir concerné par le risque à titre individuel, même si nous sommes en groupe. Il n’y a pas de risque 0, même si l’ambiance est conviviale et la montagne splendide, comme bien souvent à Oxygène d’ailleurs !
Voilà ce que j’ai retenu de ce stage.
Pour résumé, je pense qu’un membre d’Oxygène participant aux activités de randonnée doit se familiariser avec le maniement de l’ARVA, de la sonde et de la pelle.
Lors d’ une course, il doit connaître le nombre exact de participants et avoir le numéro d’urgence local dans son téléphone portable car c’est peut être lui qui devra déclencher les secours. C’est aussi peut être lui qui devra porter secours à un de ses compagnons de randonnée. En randonnée chacun doit garantir la sécurité de l’autre.
Les exercices que nous avons déjà réalisés au club sont donc à répéter dès que possible. Demandons à nos cadres de nous entrainer à l’utilisation du matériel et ne rechignons pas lorsqu’ils nous proposent un exercice ARVA qui risque de différer un peu l’heure de l’apéro…!
En ce qui concerne la pelle et la sonde, indissociable de l’ARVA, il me semble nécessaire que chacun ait les siennes ! Le club fournit déjà les ARVA (appareil coûteux).
Le stage c’est terminé le dimanche après un apéro, une soupe préparée par nos hôtes et un repas tiré du sac. De nombreux échanges avec les membres des autres clubs….
Je ne regrette pas du tout cette escapade avec nos moniteurs fédéraux.
- Recyclage ARVA dans les Hautes Vosges - 7 décembre 2008