Le petit village d’Heiligenblutt est situé au cœur de l’Autriche dans la haute vallée de la Mölltal dans le massif des Tauern.
Son histoire est riche en rebondissements et elle mérite d’être contée.
La fiole de Bricius
En 914, Bricius, un prince danois revenant de Constantinople avec une fiole remplie du sang du Christ s’y arrêta. C’est là qu’on mesure les progrès immenses qui ont été accomplis par l’industrie du tourisme puisque de nos jours l’offre en matière de souvenirs à rapporter de voyages s’est nettement diversifiée mais à cette époque lointaine quand on voulait faire plaisir à ses proches en rentrant de vacances on n’avait pas vraiment le choix.
Peu après la sortie du village, Bricius fut pris dans une avalanche et périt.
Comme le village se cherchait un nom, il s’appela « Heiligenblut » qui signifie « sang sacré ». Heureusement que le gars Bricius ne ramenait pas une boule en verre avec de la neige qui tombe sur Constantinople sinon ce charmant village s’appellerait désormais « Glaskugel-mit-Schnee-fällt-auf-Konstantinopel » ce qui est tout de suite moins romantique.
Le calme retomba ensuite à Heiligenblut pendant plus de 9 siècles ce qui faisait dire régulièrement aux ados du village « C’est grave comme ça craint ici, c’est la zone, ça fait des siècles qui se passe rien ».
Un couple people
Un beau jour de septembre 1857, un couple s’arrête à Heiligenblut et demande une chambre, enfin « ein zimmer » pour être exact. Lui s’appelle François Josef, il ressemble à Monsieur Lindt et son job c’est « empereur d’Autriche et roi de Hongrie », elle s’appelle Sissi Impératrice et a la même voix que Rommy Schneider.
Le lendemain, après être passé à l’office du tourisme, le couple part faire une randonnée en montagne, lui à pied, elle à cheval 1. Arrivé sur le glacier du Pasterze, il continue seul, enfin sans Sissi car elle avait oublié de prendre des crampons pour son cheval et arrive au sommet du Hoher Sattel qui est rebaptisé aussitôt « sommet François-Joseph ». Heureusement que la carrière d’alpiniste du Franzi s’est arrêtée là car sinon la toponymie des Alpes serait d’un monotone.
Le calme retombe ensuite sur Heiligenblut pendant plus de 150 ans faisant dire aux mamies du village « Non, non, Sissi je l’ai pas connue moi, suis trop jeune.. »
La horde sauvage
Au tout début du mois d’août de l’an 2008, une bande de sauvages venus de la lointaine Gaule envahit le camping d’Heiligenblut, plantent bruyamment leur campement, installent leurs roulottes en cercle, enfin en carré, avec bien du mal d’ailleurs.
Les enfants divaguent, le animaux domestiques s’égayent, les marmites fument jusque tard dans la nuit. La horde semble s’installer pour un long moment, peut être un temps de repos après d’autres aventures dans une lointaine contrée.
Le lendemain, un grand excité, peut être le chef de bande, court dans tous les sens, montre sans arrêt la plus haute montagne du lieu que les habitants nomment Grossglockner. Cette montagne haute de près de 3800 mètres a déjà été gravie deux siècles auparavant mais heureusement pas par « Franzi les baquantes » car sinon ça s’appellerait le GrossFranzJosefGlockner.
Avant la fin de la matinée une partie du groupe (les guerriers ?) quitte précipitamment le campement en portant des sacs qui pèsent lourdement sur leurs épaules. Vont ils cacher le butin d’un précédent forfait ?
Le lendemain, les enfants restés au campement montrent fréquemment le sommet de la plus haute montagne mais le groupe de 5 hommes et 3 femmes partis la veille n’a pas réapparu. Ce n’est que tard dans la soirée qu’ils sont revenus, en ordre dispersé, apparemment très fatigués. Leurs sacs ont l’air aussi lourds que lorsqu’ils sont partis. Certains regardent encore le sommet de la plus haute montagne, d’autres regardent leurs pieds, meurtris. Où sont ils allés, que s’est-il passé ?
Les jours ont passé, « ils » sont toujours là mais vont et viennent, à pied, en vélo, certains partent, d’autres arrivent, parfois même les enfants disparaissent pendant plus d’une journée et une nuit. Ils tentèrent même de trouver de l’or dans un torrent non loin du village. Les banquets se succèdent, « ils » semblent apprécier la boisson locale à base de malt.
Et puis un beau matin, le campement est démonté en toute hâte, « ils » sont partis comme ils sont venus, en ordre dispersé, par des chemins différents comme pour brouiller les pistes.
Epilogue
On ne saura jamais ce qu’ils étaient venus faire à Heiligenblut. Etaient ils à la recherche de la fiole sacrée car le soir, lorsque les enfants dormaient, des fioles passaient de main en main et chacun buvait une gorgée du liquide en parlant fort. Une partie du groupe serait monté en vélo au « sommet François Josef », alors avaient ils un lien avec le couple impérial ce que laisserait penser la moustache arborée fièrement par un des membres de la horde ? Et puis, la plupart venait de Lorraine et Franz était issu de la maison de Habsbourg-Lorraine…
Le mystère planera encore longtemps sur Heiligenblut.
Plus d’infos sur leur prétendue ascension du Grossglockner : compte rendu sur le site CampToCamp
Pour voir le lieu où la harde à séjourné et vivre ce qu’ils ont vécu, une excellente adresse, le superbe camping familial d’Heiligenblut.
- Cette histoire est absolument authentique dans les moindres détails ! – Nicole Avril L’Impératrice – Grasset, page 68 ↩
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